Lettres d'officiers (1788-1790).

Présentation du contenu

Ce volume contient cinquante quatre pièces, pour la plupart adressées à M. d'Alincourt, premier capitaine au régiment d'infanterie de Forez et à ses camarades. Cette correspondance témoigne de l'état d'esprit de la société militaire aux premiers temps de la Révolution. Forez est dépêché à Rennes à la fin de mai 1788, en raison de l'émeute parlementaire ; il en part le 2 juillet ayant, selon Robinet, premier échevin, " vécu en bonne police et discipline " ; il tient ensuite garnison à Saint-Servan.

Le mécontentement gronde dans l'armée ; bien des officiers sont las, comme d'autres Français " du despotisme aristocratique et ministériel ". En violation des règlements (cf. Hartmann, Les Officiers de l'armée royale et la Révolution), ils tiennent des réunions délibérantes, entretiennent des correspondances de garnison à garnison ; lettres circulaires, mémoires, sont colportés de ville en ville (documents souvent conservés à Vincennes, à l'état de copies, dans les Mémoires historiques et Reconnaissances militaires, nos 1718 et 1907). À Lille, Besançon, Metz, Strasbourg, les régiments en garnison constituent des comités. Après le 14 juillet, des pétitions, écho des cahiers de doléances, sont adressées directement à l'Assemblée nationale ; celle des officiers de Forez exprime leur espoir à l'égard d'une nation généreuse et d'un roi bienfaisant, restaurateur de la liberté française (registre M.R. 1718, venant du général de Préval, ancien directeur de l'infanterie et de la cavalerie).

Les lettres et circulaires contenues dans ce volume émanent de plus de quarante régiments à qui, dès septembre 1788, d'Alincourt a écrit. La plupart de ces régiments approuvent, et imitent, s'ils ne l'ont déjà fait, la démarche de Forez. On lit dans ces lettres le loyalisme et l'esprit de corps, le zèle pour la " régénération ", le souhait de voir créer un comité militaire auprès de l'Assemblée, la joie de la suppression du Conseil de la guerre. Les officiers de plusieurs régiments, dispersés en différents lieux, comme Lorraine-dragons, Royal-Guyenne, Royal-Roussillon-cavalerie ne peuvent délibérer ; d'autres enfin, comme Hainaut, Dauphin-cavalerie, Monsieur-dragons (vingt-sept signatures) déclinent les avances qui leur sont faites, préfèrent attendre, avec respect et soumission ce qu'il plaira au roi d'ordonner pour le bonheur du militaire.